Un refus de permis de construire ne peut pas être discrétionnaire (008)
Le Tribunal administratif de Dijon a rendu un jugement rappelant les conditions requises pour la mise en œuvre de l’article R.111-27 du code de l’urbanisme permettant à un maire de refuser un permis de construire en cas d’atteinte au cadre environnemental du quartier (TA Dijon, 24 juin 2021, n°2002839, rubrique affaires gagnées par le cabinet, droit de l’urbanisme n° 42).
Dans cette affaire, un promoteur immobilier, propriétaire d’une parcelle située dans un secteur particulièrement urbanisé et densifié avait déposé une demande de permis de construire auprès de la mairie dans le but d’édifier un immeuble collectif comprenant 11 logements sur trois étages et un attique. Ce dernier prendrait la place d’une maison individuelle qui serait détruite ainsi que de ses garages.
Or, le maire de la commune s’est opposé à ce projet en refusant la demande de permis de construire en raison du manque d’intégration de la construction au sein du quartier, lequel serait selon lui de nature à porter atteinte aux intérêts des lieux avoisinants ainsi qu’à la conservation de son architecture.
En effet, la municipalité prétendait qu’une telle construction porterait atteinte d’une part à l’aspect visuel du quartier majoritairement composé de pavillons individuels et d’autre part que l’immeuble serait trop massif pour s’insérer dans l’environnement : une différence d’échelle serait excessive en raison de la hauteur et de l’étendue du bâtiment envisagé.
Toutefois, la société propriétaire de la parcelle s’étonnait d’une telle décision accompagnée d’une justification pareille puisque cette demande de permis de construire sur ce terrain d’assiette n’est pas inédite. En effet, la société avait d’ores et déjà déposé une demande de permis de construire en 2017 dans le but d’édifier un bâtiment qui pouvait accueillir jusqu’à 14 logements, soit trois de plus que le projet en cause, et ce dernier avait été accueilli par le maire qui leur avait délivré un permis de construire. Faute de vente des logements construits, le projet avait été provisoirement abandonné.
Mais en 2019 un nouveau projet était né et prévoyait la construction de 12 logements sur cinq niveaux accompagnés d’un parking aérien en rez-de-chaussée. Une grande similitude unissait ce projet au précédent puisque la parcelle était la même et l’aspect extérieur du bâtiment était presque identique. Ce projet se voulait seulement moins ambitieux avec moins de logements et une plus petite superficie.
Toutefois, le promoteur a dû faire face à un refus de la part de la mairie qui a refusé son permis de construire en raison du nombre de logements prévus et avait imposé des conditions supplémentaires à remplir pour pouvoir construire un tel édifice.
Alors que ces conditions remettaient en cause la substance même du projet, un troisième et dernier projet a été soumis au service urbanisme de la commune.
Ce dernier projet avait pour ambition de contenir 11 logements, soit un de moins que le précédent, répartis sur trois niveaux et un attique. La similitude avec les deux derniers projets se poursuivait puisque la parcelle et l’aspect visuel étaient les mêmes. Mais encore une fois, la maire a décidé de ne pas accorder le permis de construire en changeant toutefois les motifs de son refus : une telle construction porterait gravement atteinte à l’environnement du quartier.
Une telle décision restait incompréhensible pour le propriétaire du terrain puisqu’à la lecture du projet, il était flagrant que le bâtiment litigieux ne serait pas excessif dans sa superficie afin de ne pas porter atteinte à la vue des résidents du quartier ; il était le plus petit des trois projets déposés.
Par ailleurs, aucun argument de la sorte n’avait été défendu jusque-là, malgré le refus du précédent projet, il n’était nullement question de la remise en cause du caractère du quartier par le bâtiment, pourtant les similitudes entre ces deux projets sont évidentes.
De plus, le quartier bien que majoritairement constitué de maisons individuelles comptait tout de même un nombre non négligeable d’immeubles collectifs.
Enfin, ces édifices ne faisaient pas partie d’une même unité architecturale qui était propre au quartier mais se composaient de styles très hétérogènes. Ainsi, il ne pouvait être remarqué aucune qualité architecturale particulière mise en jeu.
Le Tribunal administratif va donc prononcer l’annulation de la décision de refus de permis de construire et va également enjoindre au maire de délivrer le permis de construire demandé par la société dans un délai d’un mois.
En premier lieu, le Tribunal ne retient aucune spécificité architecturale rattachée au quartier en reprenant la qualification du rapport de présentation du plan local d’urbanisme qui le décrit comme une « juxtaposition de typologies bâties très différentes ». Ainsi, il récuse le motif de préservation de l’environnement architectural avancé par la commune pour justifier son refus puisqu’aucun enjeu de la sorte n’est en cause.
De plus, le Tribunal confirme la présence de bâtiments collectifs dans le quartier, plus grands et plus hauts que celui contenu dans le projet litigieux bien que ce dernier soit très logiquement, plus important que la superficie des maisons avoisinantes.
Enfin, l’aspect extérieur de l’immeuble ne peut pas non plus être remis en cause en raison du caractère hétéroclite du quartier déjà plus que démontré.
C’est pourquoi, le Tribunal décide d’annuler le refus de permis de construire litigieux.
En second lieu, le Tribunal enjoint au maire d’accepter le projet sous un mois. En effet, aucune disposition d’urbanisme n’interdirait un tel projet et la situation de fait actuelle n’y fait pas non plus obstacle comme il l’est suffisamment prouvé ici.
Une telle décision de refus relève donc de l’appréciation personnelle et discrétionnaire du maire.
Cette décision démontre un contrôle poussé du juge administratif sur l’exercice des prérogatives du maire et l’utilité de la juridiction administrative face au refus discrétionnaire d’une autorisation d’urbanisme par des élus locaux.
Le Cabinet de Maître Ciaudo se tient à la disposition des administrés se trouvant dans une situation similaire afin de défendre leurs intérêts.
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